Habitant

Irène Lambert

Quevillaise de 97 ans

Depuis 75 ans dans la même maison familiale à Petit-Quevilly, Irène Lambert est née Irena Sobczynska en Pologne. Elle a vécu, malgré la tragédie de la guerre, une histoire d’amour de 60 ans avec un Quevillais..

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Irène est une petite dame souriante, coquette, avec un charmant accent... Elle a vécu toutes ces années dans la maison de ses beaux-parents, près du boule-vard du 11 Novembre. Elle se souvient de sa jeunesse dont elle parle parfois à sa voisine Dominique.

 

 

Je suis née en 1923 et ma sœur en 1925 à Łódź. C’était le centre textile le plus impor-tant d’Europe, avec des ma-nufactures de coton, laine et soie. Quand la seconde guerre mondiale a éclaté, je travail-lais dans une fabrique de bon-bons. Ma sœur et moi avons été raflées en 1940. Nous nous sommes retrouvées à Berlin, en Allemagne, dans une usine de marchandises où il y avait des Belges, des Français. Georges Lambert, ajusteur mécanicien à l’usine Malétra, est arrivé un jour avec d’autres réquisitionnés du Service du Travail Obligatoire. Je l’ai tout de suite trouvé beau. Nous nous sommes aimés et nous avons promis de ne pas nous quitter. À la fin de la guerre, il est reparti à Petit-Quevilly. Ses parents ont écrit une lettre au gouvernement pour que je puisse venir en France car je n’avais plus de famille. J’ai été recueillie par la Croix Rouge Française. J’ai parcou-ru des centaines de kilomètres en train et en bus depuis l’Allemagne : je suis arrivée à Petit-Quevilly le 25 décembre 1945 ! Nous nous sommes mariés le 14 septembre 1946. Georges aidait son père qui avait 4 chevaux : une enseigne “Lambert transporteur” était accrochée sur le portail en bois. Ma belle-mère élevait des chèvres dans la cour et ven-dait le lait. Comme je faisais déjà de la couture en Pologne, je suis entrée aux fermetures Eclair en 1954. Pour notre bon-heur, notre fille Béatrice est née en 1960. À cette époque, aux beaux jours, les voisins bavardaient sur le trottoir. Je me souviens encore de l’ani-mation dans la rue lors des fêtes du 14 Juillet et du 15 août où les gens dansaient, s’amusaient...

Veuve, Irène pense chaque jour à Georges et conserve lettres, documents et photos de leur vie. Elle s’entoure des cadres de sa fille, son petit-fils et arrières petits-enfants Léonie et Raphaël. Elle conti-nue à cuisiner des spécialités polonaises comme les Kluski, boulettes de pommes de terre ou de viande. Connue de ses voisins, c’est la mémoire de la rue.